En tous les cas si ce moyen existe, les deux heures suivantes passées à chercher un poste de commande, un interrupteur ou un quelconque disjoncteur, ou encore un moyen autre pour bloquer ces plateaux ou les actionner, ne nous permirent pas de le trouver.
Après une dernière tentative de faire du feu, soldée bien entendu par un nouvel échec, nous rentrons le reste des fruits et les prises de chasse à l'intérieur, puis, la nuit étant maintenant profondément noire, et le ciel dégagé, je décide de remonter sur le toit, en quête de quelques lumières de civilisation. C'est peu convaincant. La nuit semble si pure, c'est vraiment un lieu privilégié pour l'observation des étoiles, et c'est plus à leur lumière que je me consacre à défaut d'en trouver à l'horizon. J'ai du mal à croire que nous n'ayons installé de télescope par ici, le ciel est d'une pureté extrême. Plus jeune, enfant même, j'avais une passion pour l'astronomie, les planètes, les autres mondes, tout cela me fascinaient. Mais j'ai beaucoup oublié et je suis dans l'incapacité totale de reconnaître la moindre constellation, pas même la grande ourse, pourtant si simple à trouver. Toutefois cela indique sans doute que nous sommes dans l'hémisphère sud, et explique que le ciel me soit si étranger. Je contemple néanmoins de longues minutes la douce traînée de la Voie Lactée, que j'ai rarement vue aussi belle, avant qu'Erik et Naoma ne m'interpellent, impatients. Je les rejoins.
- Je n'ai absolument rien vu, pas une seule lumière, même un semblant. Le ciel en est magnifique, d'ailleurs, mais je n'ai reconnu aucune constellation, à mon avis nous devons nous trouver dans l'hémisphère sud.
Erik n'est pas convaincu.
- Mouais... Tu devrais terminer ton histoire, Naoma...
- Oui tu as raison.
Je commence à être un peu fatigué :
- Nous devrions plutôt aller nous coucher, non ? Il est sûrement tard et il faudra bien demain que nous trouvions comment faire du feu pour avoir autre chose à manger que ces fruits.
Naoma est d'accord avec moi :
- Allons dans les tubes, ils sont assez confortables, et de plus je pourrai continuer un peu l'histoire.
Jour 132
Une fois tous trois confortablement allongés, Naoma reprend son récit :
" Une fois la visite de sa maison terminée, Bakorel nous a emmené dans une nouvelle pièce aux murs recouverts de graphitis, d'inscriptions, de dessins. Il s'est ménagé un espace vierge en effaçant une partie du mur, et avec une sorte de bout de roche, une sorte de craie, il a commencé à dessiner. Il a dessiné deux cercles, sur le premier il a rajouté un carré avec une flèche et nous a fait comprendre que ça représentait l'endroit où nous nous trouvions. Ensuite il a semblé nous demander si nous venions de l'autre cercle. Erik m'a suggéré que Bakorel pensait que nous venions d'une autre planète. Peut-être avait-il toujours été sous terre, ou peut-être n'avait-il jamais vue de noirs, car c'est vrai que moi et Erik avions la peau de couleur, et nous n'avions vu que des personnes blanches ici.
- Tu crois qu'il est né ici et n'a jamais mis les pieds dehors ?
- En tous les cas ça en a l'air.
Je tentais alors de mimer à Bakorel que nous ne venions pas d'une autre planète, mais que nous venions d'en haut, de la surface. J'ai aussi essayé d'indiquer que c'était là que nous voudrions retourner. J'ai été étonnée quand il a employé le terme "sortir", mais Erik m'a expliqué qu'il lui avait appris quelques mots de vocabulaire. Bakorel était perplexe et il a tenté de nous dissuader en répétant que sortir égalait mort. Bakorel semblait très curieux, et ensuite il a écrit son nom sur le tableau, dans une langue qui devait sûrement être de l'hébreu, la même que celle sur les cahiers que tu avais trouvés, puis il nous a demandé d'écrire nos noms. J'ai écrit "Naoma" et "Erik", et il a regardé nos deux noms d'un regard surpris. Sans doute s'attendait-il à ce que nous utilisions le même alphabet que lui. Alphabet qu'il a semblé ensuite écrire, tout comme il a écrit les chiffres de zéro à neuf. J'ai fait de même à mon tour