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Je la regarde, me rappelant son beau visage quand elle m'avait sorti des sous-sols de Sydney, ou encore quand elle m'avait retiré le traceur, toujours en Australie.

- Vous ne m'avez retiré le traceur que parce-que vous alliez partir et vous n'avez plus besoin de me suivre ?

Elle me regarde les yeux curieux, puis comprend de quoi je parle. Elle attend quelques secondes, me regardant avec ses grands yeux tristes, puis dit finalement, en se tournant vers la capsule d'Énavila :

- Désolé de vous avoir mêlé à cette histoire.

- Je ne suis pas sûr de le regretter.

Elle se retourne et laisse sa place à Metthios et Yamwreq qui tirent avec force la capsule :

- Moi si.

Sarah regrette ? C'est étrange... Quel rôle joue-t-elle exactement dans cette histoire ? A-t-elle été manipulée à son tour par Goriodon ? Quel jour sommes-nous, au fait ? Je demande à Yamwreq et Metthios, qui tirent Énavila par les pieds :

- La séance du Congrès a-t-elle eut lieu ce matin ou hier ?

Yamwreq me répond :

- Ce matin, vous n'avez dormi que cinq ou six trente-sixièmes.

Ce qui veut dire que c'est toujours mon cent quatre-vingt douzième jour, ne perdons pas le compte. Énavila semble toujours endormie :

- Elle n'est pas réveillée ?

- Non, nous ne la réveillerons qu'une fois dans la station. Nous n'avons guère le temps pour ses caprices.

Je ne sais toujours pas si je dois la considérer comme une amie ou une ennemie. Je pense que la seule fois, lors de l'évasion, où elle

a en apparence changé de bord, ce n'était que dans l'espoir que je puisse l'aider. Je préfère alors me taire plutôt que d'argumenter en faveur de son réveil. Je choisis plutôt de profiter de la présence de Sarah.

- Sarah, maintenant que tout est découvert, vous ne voulez pas m'en dire un peu plus ? Savez-vous où se trouve la Terre, et comment y retourner ?

Elle me regarde sans me répondre. Elle est habillée de blanc, une combinaison moulante. Je l'ai rarement vue autrement, hormis ses tenues décontractées quand elle est venue au Congrès. Les autres ont aussi des combinaisons, j'ai moi toujours les même habits qu'au Congrès. Il fait assez frais dans la station, mais la température reste toutefois supportable. Si mon corps donne les mêmes sensations que sur Terre, je dirais qu'il fait aux alentours de quinze ou seize degrés Celcius. Metthios et deux autres personnes transportent Énavila. La porter ne semble pas la tâche la plus difficile, la faible gravité lui donnant le poids d'une plume, c'est plus de conserver l'équilibre et de faire attention qu'elle ne tombe pas ou ne tape pas dans un mur. Nous sommes dans une toute petite pièce, surplombée par la coque du vaisseau. Celui-ci semble petit, même si on ne voit qu'une partie au-dessus de nous, sans doute pas plus grand qu'un gros avion de chasse, peut-être deux, un F16, disons. Il est maintenu en l'air par une sorte de paroi translucide qui suit ses contours et forme une interface étanche entre l'espace et la pièce. Cette paroi, même si c'est difficile à estimer, doit tout de même faire dix ou vingt centimètres d'épaisseur.

Une porte d'ancien temps s'ouvre pour nous permettre de sortir, une porte mécanique, un peu comme dans tous les films de science-fiction. Elle grince d'ailleurs légèrement. L'ai est moins dense que sur Adama, ma respiration est plus saccadée. La pression doit être beaucoup plus faible.

- C'est vieux ici.

Yamwreq confirme :

- Oui, très vieux, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous sommes ici.

- Des gens habitent encore sur cette station ?