page 226 le patriarche 227

je suis mort trois fois et que j'étais un informaticien boulanger...

- Oui, trois fois, tu es morts trois fois... Je ne comprends d'ailleurs pas, je ne comprends pas vraiment comment c'est possible... Et Erik, tu l'as vu ?

- Erik ?

- Un grand noir, il était avec nous. Mais d'ailleurs je ne comprends pas comment tu as pu sortir de ses tubes. Ça voudrait dire qu'ils t'ont ramené de France pour te soigner ? Mais alors ils doivent savoir... Quelqu'un t'a suivi ?

- Je t'avouerais que je n'en sais rien. Peut-être, je n'ai pas fait attention. Enfin je ne crois pas... Je n'ai pas eu l'impression, et puis j'aurais quand même remarqué, dans le car, et puis dans les bus... En plus j'ai couru ce matin.

- Tu cours tout le temps !

- Je cours ?

- Oui, tu aimes bien ça, quand tu travaillais à la boulangerie tu rentrais souvent chez toi en courant. Tu courrais tout le temps d'ailleurs... Finalement ce n'est pas trop étonnant ce qu'il t'arrive, tu cours tout le temps...

- Je me suis demandé ce matin si j'étais fort en course ou pas, mais j'ai couru assez facilement, je n'étais pas essoufflé.

Naoma me regarde en souriant.

- Qu'est-ce que tu manges ! Moi qui comptais me faire une salade pour ce soir aussi ! Et tu as presque mangé tout le pain !

- Désolé, mais depuis que je me suis réveillé j'ai toujours faim...

- Tu veux que je te fasse des pâtes ?

- Hum, non t'embêtes pas...

J'hésite...

- N'hésite pas, tu sais ça me fait plaisir.

- Et puis si, s'il te plait, ça serait gentil.

- J'aime toujours autant ton sourire.

- Quand est-ce que tu m'as vu pour la dernière fois ?

- Pour la dernière fois ? Je t'ai vu à ton enterrement, mais... Sinon avant c'était sur la Lune, oui... Dans la cellule.

- Sur la Lune ? Mais, on a des villes là haut ? Il y a des gens sur la Lune ?

- Il semblerait... En fait je n'en ai pas trop parlé depuis que je suis revenue. J'étais toute seule, j'avais peur, j'ai préféré me faire oublier. Quand ils t'ont tué toi et Erik... Je... J'ai cru qu'ils allaient venir m'éliminer moi-aussi... Et puis non, je n'ai pas eu d'histoire... Maintenant je me sens un peu mieux... Mais pendant des mois j'avais peur, tout le temps, j'avais peur qu'on me suive dans la rue... Pendant trois mois je suis retourné habiter chez mes parents, et puis depuis le mois d'avril, je vais un peu mieux, j'ai moins peur, j'ai repris une vie un peu plus normale...

- Mais qui sont ces gens, ce "ils", c'est qui ? Qu'est-ce que j'ai fait, pourquoi m'ont-ils tué ? Et ses tubes ?

- J'en sais rien, Franck... J'en sais rien... Je crois que j'avais trop peur pour avoir envie de savoir, alors j'ai tout gardé pour moi, je n'ai pas cherché à en savoir plus... Maintenant que tu es revenu...

Elle me regarde en souriant, se lève et viens se remettre derrière moi. Elle m'enlace et m'embrasse sur la joue.

- Maintenant que tu es revenu, les soucis vont recommencer... Mais avec toi ce n'est pas la même chose.

- Tu sais je ne suis pas sûr que je pourrai vraiment faire quelque chose maintenant. Je ne me rappelle de rien, je ne comprends pas grand chose à cette histoire.