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mais la substance n'en est pas formidable, si ce n'est le statu quo dans l'attente de la mise à niveau de Naoma. Celle-ci habitera chez moi pendant encore quelques temps, dans la mesure où la construction d'un chalet ne se justifie pas tant que nous n'avons pas définitivement pris résidence dans le village. Cette décision n'enchante pas outre mesure Pénoplée, mais nous aurons toute latitude de nous retrouver chez elle.

Jour 142

Milieu de journée, il fait beau, j'ai réussi à m'échapper un peu, à retrouver cette solitude que j'aimais temps, par moments. J'ai retrouvé mon récit au jour le jour. Je me promène à la lisière du bois, un peu avant où mon ennemi de toujours, le sable, se fait dorer au soleil...

17 trente-sixièmes, 4 sixièmes et 3 petits, mes heures, minutes et secondes me manquent aussi un peu, ressentant mieux le temps s'écouler sous leur implacable progression. Le temps d'ici n'avance pas vraiment. Pas de catastrophes, pas de prises d'otages, pas d'avion qui s'écrase, pas de guerres qui perdurent... Du calme, de la tranquillité, la sensation que tout le monde est heureux, que tout le monde a sa place...

Jour 144

C'est bon, de pouvoir marqué l'instant, de pouvoir laisser trace de ce bonheur, allongé, là, toi dans mes bras, ma belle Pénoplée, endormie sur mon torse, le corps encore un peu chaud de cet amour auquel tu reprends goûts.

Je pensais que je ne m'attacherais pas à toi, je pensais que tu étais trop passive, trop lasse, trop distante... Mais tu n'es qu'une petite fille, nous ne sommes tous que des enfants, des enfants qui grandissons trop vite dans un monde trop sérieux... La vie est belle, ici, ici où nous pouvons vivre l'amour sans peur du lendemain, ou jamais nous n'aurons de manque ou d'épreuves...

Mais la vie est sans doute trop belle, on ne progresse pas dans la facilité, il me faudra partir si je veux vivre...

Jour 146

Il faudra une dizaine de jours avant que Naoma n'ait son

bracelet, même si alors sa maîtrise de la langue est encore loin d'être parfaite. Nous passons beaucoup plus de temps ensemble, avec Erik et elle, et si Pénoplée et Guerd ne s'en plaignent pas ouvertement, cet état de fait a sans doute créé une petite tension. Mais hormis ce point la vie est plus que paisible, et si le paradis existe nous n'en sommes pas très loin. J'avoue que d'avoir terminé de raconté mon récit et me retrouver, comme au moment du départ de chez Martin, à raconter au jour le jour, me séduit, me permettant de conter plus mes humeurs, comme au bon vieux temps, que les faits purs et durs... Mais, finalement, cette alternatives m'effraie un peu, comme un signe qu'il va être temps au sort de nous faire repartir ?

Les journées sont tranquilles, je dors la plupart du temps chez Pénoplée et nous nous retrouvons dans la matinée avec Erik, Naoma et qui le veut pour les activités de la journée. Souvent consacrées à des balades, des virtuels ou d'interminables pique-niques au bord de la mer.

Si Naoma a reçu son bracelet en ce cent quarante-sixième jour, alors qu'elle ne maîtrise pas encore totalement la langue, c'est aussi parce que le Congrès semble plus pressé encore que ne l'avait suspecté Iurt ; et Guewour lui-même incitait les villageois à accélérer notre intégration pour prévoir au plus vite une session sur Adama, sans même faire de premier passage par virtuel interposé à partir du village. Il faut dire que notre arrivée est exceptionnelle à plus d'un titre, et le fait qu'elle remette en cause la fiabilité des artificiels les rendent suspects pour les affaires nous concernant.

Pénoplée trouve cette précipitation suspecte, quant à moi je la trouve salutaire, signifiant sans doute qu'il y a des intérêts dans cette histoire, nous garantissant une certaine aide dans la résolution de ces énigmes.

Cent quarante-sixième jour donc, bientôt cinq mois depuis notre départ... Cinq mois... C'est bien assez pour que le monde change, c'est assez pour avoir un noyau linux 2.6, quoique... C'est assez, par contre, pour que nous ne soyons plus que des souvenirs à notre retour, si retour... Cent quarante-sixième jour, Naoma découvre les joies de la communication et du contrôle de son corps. Cent quarate-sixième jour, nous serions presque satisfaits que quelques uns passent encore, dans