Mais nous n'avons pas perdu de temps, et une fois un peu de nourriture emballée, nous nous sommes préparés à partir. Erik s'est inquiété quand même que nous n'avions pas d'eau, mais Bakorel avait heureusement quelques pains d'eau qui étaient une vrai merveille pour transporter de quoi boire facilement. Nos paquetages prêts, nous avons repris sans tarder le chemin de la veille pour sortir. J'étais toujours pétrifiée par cette sortie au niveau des forges, et il ne faudrait pas que je fasse ce passage souvent si je ne voulais pas mourir d'une crise cardiaque.
À marcher à quatre pattes en permanence je compris rapidement qu'il nous fasse deux jours, c'était très éprouvant ; je me suis demandée comment faisait Bakorel qui se promènait dans ces couloirs depuis plus de dix ans ! Heureusement que tout s'est plutôt bien passé, nous avançions doucement mais nous ne faisions que de rares et courtes pause. Par contre nous traversions toujours et toujours les même enchaînement de couloirs, de salle de fabrication de combinaisons, de galettes ou de je ne sais encore trop quelles armes dont parlait Bakorel. Après cinq ou six heures, nous nous sommes enfin arrêtés enfin pour manger et nous reposer un peu.
Erik et Bakorel ne m'ont pas laissé plus d'une demi-heure de pause, nous sommes repartis. Mes genoux me faisaient horriblement souffrir, je ne savais pas si je pourrais tenir très longtemps. La combinaison avait beau amortir un peu, ce n'était pas tellement le frottement mais juste le poids du corps qui fatiguait. Je bénissais les passages où nous devions monter une échelle, permettant de se dégourdir les jambes et de s'étirer un peu. Nous nous sommes attardés quelques instants au-dessus d'une salle où une trentaine d'hommes s'entraînaient au maniement de l'épée. Sans doute de ceux qui nous avaient amenés ici. Mais combien d'hommes y avait-il dans ces sous-sols ? Je profitais d'une nouvelle pause quelques heures plus
tard pour le demander à Bakorel. Il lui a fallu quelques temps pour m'expliquer le principe de la multiplication, qu'il décrit en représentant des petits groupes virtuels sur le mur. Finalement il estimait, si j'ai bien compris, entre dix mille et trente mille le nombre d'habitants, ce qui me parut énorme. Peut-être n'était-ce plus justement qu'entre mille et trois mille, comme le pensait Erik. Mais en y réfléchissant s'il fallait fabriquer la nourriture, les combinaisons, et toutes leurs usines et forges pour les armes et les avions, c'était peut-être cohérent. Il me paraissait juste incroyable qu'il y ait dix mille, voire même trente mille personnes qui vivent cachés sous le sol depuis des dizaines d'années.
Nous avons continué notre avancée, et nous nous sommes arrêtés pour le soir, autant qu'il puisse y avoir un soir au milieu des lumières artificielles, après être montée à des échelles pendant sans doute près d'une heure. J'avais les bras en compote. Je ne sais pas combien de centaines de mètres nous avions montés. Bakorel nous avait emmené dans un petit recoin un peu plus large, ou il faisait un peu plus chaud, pour la nuit. Je tentais de lui demander la distance entre sa cachette et ici, et entre ici et la surface. Il m'indiqua tout d'abord son unité de mesure, quelque chose qui ne devait pas faire loin d'un pied, soit de l'ordre de trente-trois centimètres. En utilisant cette mesure, nous avions monté environ six cent mètres dans la journée, et je fut heureuse d'apprendre qu'il ne nous restait que quatre cent mètres pour le lendemain. Nous étions descendu à près d'un kilomètre sous terre, c'était vraiment incroyable.
Je dormis mal, très mal, inquiète et réveillée au moindre bruit qui résonnait dans la conduite. Je ne savais pas trop s'il y avait des bêtes qui couraient, ou des insectes, mais rien que d'y penser j'en avais la chair de poule. Bakorel, lui, semblait dormir profondément, et je n'ai pas entendu Erik, mais quand Bakorel s'est finalement réveillé et que nous avons mangé un bout, à la vue de sa mauvaise humeur, pas tellement qu'il n'en eut pas d'habitude, mais à ce moment d'autant plus, je me suis dit qu'Erik n'avait pas dû lui non plus faire de si beaux rêves. Le déjeuner a été frugal mais ces galettes tenaient bien au corps.
Nous n'avons pas traîné et nous avons repris rapidement notre route. La conduite a changé un peu après, elle était désormais