n'avons ni tissus ni pansement. Je me contente de répandre le peu de bave qu'il me reste sur les blessures pour désinfecter... Quand je me sens un petit peu mieux j'accepte le fruit qu'Erik me tend, et qui me désaltère un peu. Nous mangeons ensuite à pleines dents le léopard qu'Erik a dépecé avec une pierre tranchante. Le ventre plein, je m'endors en quelques secondes juste après, sans même la force de discuter un peu.
Je suis réveillé plusieurs fois dans la nuit, soit par mes blessures qui sont douloureuses quand je bouge, soit par des bruits suspects. Je m'aperçois qu'Erik a dû ramener plusieurs branches de bois qu'il a disposées tout autour de nous.
Je suis pourtant le dernier debout quand le lagon reçoit enfin les rayons du Soleil par-dessus les hauts rebords du cratère. Erik s'aperçoit que je me suis réveillé :
- Ça va ?
- Oui je crois, j'ai faim.
- Il reste du léopard, je ne suis pas allé chercher de nouveaux fruits, je pense qu'il est plus prudent que l'on ne se sépare pas. J'avais mis des branches tout autour pour la nuit, je ne sais pas si elles nous ont protégés ou pas, mais je n'ai rien entendu, et vous ?
- Je me suis réveillé quelques fois, mais plus parce que mes blessures me faisaient mal. J'ai eu un peu froid par contre. Je pense que ce serait pas mal d'utiliser la peau du léopard.
Naoma s'exclame :
- Le pauvre ! Mais tu n'es pas contre les habits en peau d'animaux ?
Sa remarque ne me convient guère :
- Et oh ! Il est mort ton léopard ! Et vu ce qu'il m'a fait, c'est de bonne guerre ! Je ne l'ai pas dézingué au fusil, c'était à la régulière ! Et j'ai gagné, alors, hein ! J'en fait ce que je veux !
Erik coupe nos chamailleries :
- Mangeons un bout, puis allons chercher des fruits, j'ai toujours autant soif.
Naoma semble impatiente de bouger :
- Ne devrait-on pas partir tout de suite vers le Nord, si nous voulons trouver une ville rapidement ?
Pour ma part je préfèrerais encore un peu de repos :
- Nous pourrions installer un petit campement quelques jours, pendant lesquels on fabriquerait de nouveau des outils et des armes, et partir une fois plus équipé ? D'autre part je ne me sens pas de partir tout de suite.
Erik est d'accord avec moi :
- Oui je pense comme Ylraw, par contre vaut-il mieux rester ici proche de la falaise, ou nous auront peut-être plus de facilité à recueillir de l'eau, ou traverser la forêt vers la mer, où nous pourrons pêcher du poisson ?
Mais traverser la forêt ne me tente guère :
- Je suis d'avis de rester ici quelques jours, et nous traverserons la forêt si nous ne nous en sortons pas ici. Je préférerais ne pas m'y aventurer sans de quoi nous défendre.
Tombés d'accord, nous mangeons avec appétit de la viande maintenant froide du léopard, puis nous partons tous trois pour quelques cueillettes matinales. J'ai un mal fou à marcher. De jour la recherche des fruits est rendue aisée, et bien vite nous sommes repus de divers savoureux fruits. Mes blessures me fatiguent beaucoup, et le moindre geste me fait souffrir. Je mets quand même la main à la pâte quand nous entreprenons de nous refaire une trousse à outil digne de ce nom, et un abri pour dormir un peu plus sûr. L'emplacement un peu en hauteur sur le flanc de la montagne est sécurisant et nous donne un bon point de vue sur la forêt. Notre technique de tressage de corde dorénavant éprouvée nous permet, en quelques jours, d'être protégés et à l'abri sur un gros rocher que nous escaladons avec une petite échelle.