page 22 le patriarche 23

22 juillet, 2001, 9 heures 08, nuit trop longue, nuit trop facile, où êtes-vous, mes insomnies ?

Peut-être finalement que c'est seul que chacun doit faire son chemin. Peut-être aussi que n'importe pas cette morale et cette vertu ; pourquoi donc s'inquiéter du futur, des autres, et pourquoi ne pas simplement prendre le plaisir où il est, vivre intensément, pour mourir jeune et plein d'images ? Il est des jours où on se demande s'il y a réellement quelque part une grandeur de l'homme, ou si ces habits ne sont pas que la honteuse couverture d'instincts primitifs qui sont toujours intacts et ne font que se révéler de plus en plus, à la mesure de la facilité grandissante de la vie dans nos sociétés modernes. Mais comment la spiritualité et la sérénité peuvent-elles sortir d'une suite de plaisirs pris comme ils viennent ? Encore une fois n'est-il pas infiniment plus séduisant de mériter ? Le bonheur de l'instant est si facile, il ne peut ne pas avoir de contrepartie. La solitude doit être un bonheur plus grand, peut-être. Toute cette histoire qui nous vient de la Bible, Ancien Testament, Coran, et autres, ne serait-elle pas finalement l'amoncellement de l'expérience de la voie qui mène a la sérénité et au bonheur ? Et que notre soif de plaisir immédiat ne fait que bafouer pour nous ramener dans la solitude, la tristesse et l'oubli...

Il est paradoxalement parfois réconfortant de ne rien attendre, de vouloir juste faire ce que l'on a à faire, et de ne pas espérer, ou vouloir, plus que ce que l'on a ; comme si la fatigue et la lassitude avaient pris place définitivement. L'occupation désintéressée semble le doux réconfort de l'oubli et de l'insouciance, comme si on cherchait à s'occuper l'esprit simplement, pour faire passer le temps.

Lundi, premier jour de la semaine.

Dernière semaine de juillet 2001.

Qu'aurais-je fait en ce mois ? Qu'aurais-je fait pour en être fier et qu'aurais-je fait pour avoir à faire mieux le mois prochain ?

La prise de conscience peut-être, simplement, la prise de conscience que la vie n'est pas ce que j'ai, et que l'avenir n'est pas ce que j'attends.

Mardi 24 juillet 2001

Réveil sans réveil, point d'urgence, trop de sommeil même, peut-être, à croire que la mesure n'existe pas, soit trop soit pas assez, mais que préférè-je, entre me réveiller près d'elle ou reposé, que préférè-je, entre la déraison et l'ordonné, entre les caprices des relations humaines, et le charme réconfortant de la solitude ?

Tout semble encore bien confus, mon désir d'être d'il y a quelques jours, ma soif de contrôle, peut-être aussi. Tout cela n'est pour l'instant que rêve et je me confronte toujours, comme beaucoup, à subir les jours, les nuits, le temps qui passent. Mettre en valeur chaque instant, ne perdre rien, que chaque moment apporte toujours sa part. Mais il est si facile de dire, si facile de se croire fort, tranquillement installé chez soi, et de s'apercevoir de sa faiblesse, de ses faiblesses, quand on se retrouve en face de ce que l'on attend, comme si on se connaissait si mal, que la surprise de nos envies, de nos réactions, est une excuse pour remettre à plus tard nos volontés. L'accord entre notre raison et nos actes serait-il moyen à grandir notre sérénité ? Ou n'est-ce encore qu'un aveuglement de plus sur les buts et desseins de l'homme dans son ensemble, homme animal, physique, moral, spirituel ? Y a-t-il vraiment un chemin sans souffrance pour l'homme, ou restera-t-il déchiré entre ses instincts et ses rêves tant que sa couverture charnelle dictera ses volontés bien plus fort que les soupçons de raison qui l'habitent ? La solitude ou la déraison, que vaut-il mieux ?

Mardi, 24 juillet 2001, 8 heures 08 deuxième jour de la semaine, longue semaine, comme si la réaccoutumance rendait le temps plus présent, moins fluide, plus pesant...

Il est des moments où on ne sait jamais trop ce que l'on doit faire, où entre un mal et l'autre, il est difficile de choisir. Le mal d'être loin, mais qui lui permet d'oublier, et le mal d'être près, qui remue le couteau dans notre plaie. Il est si dur de laisser s'écouler ses jours quand on ne sait pas sa route. Il est si dur d'accepter d'attendre, pour savoir, quand tout ce qui nous importe est ailleurs que là. Il est si dur de réapprendre à rester seul. L'impatience, c'est peut-être cela, finalement, qui nous détruit tous...