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est cuit. Cela dit sa fille a très bien pu l'appeler, je suis complètement déconnecté, dans un nuage, et je n'entends et ne vois presque plus rien. J'ai mal partout, je ne sens même plus la faim, juste mes muscles qui me brûlent, presque autant qu'au moment où je me suis enfui du Pentagone, quand j'ai poussé la grosse porte dans le mur... Mais c'est une victoire ! Je l'ai eu ! J'ai gagné la bataille de la citerne, ce jour restera gravé dans toutes les mémoires ! Mais après ce premier succès il ne faut surtout pas que je flanche à mon tour et que je finisse cette foutue citerne, histoire qu'il ne lui reprenne pas l'idée de faire un concours de force avec moi, non mais !

J'en ai encore pour une bonne demi-heure à un rythme bien ralenti pour terminer. Quand je finis enfin et que je me redirige vers la maison, je m'aperçois qu'ils sont tous les deux à siroter une bière en me regardant. Ils sont aussi cruels l'un que l'autre, finalement...

- Allez viens donc champion, tu as mérité ton repas !

Un peu mon pote ! Je les suis dans la maison, Deborah me met la main sur l'épaule et me sourit pour me montrer le chemin, elle doit être contente que j'aie rempli la citerne, c'est peut-être elle qui s'y colle d'habitude. Nous nous installons dans la grande salle à manger. Il fait plutôt frais à l'intérieur, comparé à dehors. Je ne sais pas trop ce que je mange, il y a de la viande et des patates, on dirait. Mais peu importe. Je mange doucement et pas trop, pour ne pas me détruire l'estomac, qui me fait encore souffrir. Finalement le père m'interroge :

- Alors, qu'est-ce que tu faisais perdu dans le désert, mon garçon ?

Je m'apprête à répondre quand Deborah intervient.

- Laisse-le donc un peu, tu ne vois pas qu'il est épuisé ! Ylraw, viens donc avec moi dans la cuisine te choisir un dessert. Papa, tu prends comme d'habitude ?

Le père acquiesce, et Deborah m'entraîne avec elle dans la cuisine.

- Surtout, ne lui raconte pas la vérité, si tu lui dis que

l'armée t'en veut, demain tu te réveilles mort avec deux balles dans la tête. Ici on ne rigole pas avec les ennemis d'État.

Elle est gentille, et qu'est-ce que je vais faire, moi ?

- Euh, pfff, oui mais qu'est-ce que je vais raconter ?

- Eh bien je ne sais pas, invente, trouve un truc.

Moralité je profite à peine de mon dessert, pourtant très bon, et j'ai le ventre noué quand je lui sors une histoire pas très crédible, mais elle a au moins le mérite de ne pas trop être loin de la vérité. Comme quoi je me suis trompé d'avion à Paris, que par miracle les contrôleurs n'ont rien vu, et que je me suis retrouvé à Washington alors que je devais partir en vacances à Dakar. Ensuite de Washington je me suis dit que je pourrais descendre vers Raleigh ou se trouvait une cousine de la famille, avec qui j'étais en correspondance mais dont je n'avais plus de nouvelles depuis deux mois. Qu'après plusieurs jours là-bas je me rends compte qu'elle n'est plus dans cette ville mais a déménagé pour Austin. J'explique alors que, sur le point de retourner en France en avion, un coup de chance pas croyable me fait gagner une Viper à une tombola à Raleigh. Et que je décide alors de partir pour Austin avec. Et c'est alors que je m'étais arrêté sur le bord de la route pour aller faire pipi que cet hélicoptère a commencé à canarder la voiture. J'invente ensuite que le choc à dû me faire perdre connaissance, ou conscience, et que j'ai dû marcher un certain temps dans le désert, avant que sa fille ne me trouve.

Deborah me regarde, apparemment inquiète que je ne mette la puce à l'oreille à son père, mais s'il semblait dubitatif au début, il a l'air content de l'explication de la route coupée.

- Ah ! C'est donc ça l'origine de la route coupée ! Ce n'est pas uniquement une roquette tirée par erreur sur une route ! Ça ne me semblait aussi pas très crédible. Ils ont fait une gaffe en prenant votre voiture pour une de leurs cibles ! Sûrement un bleu qui a quitté la zone militaire sans faire attention. Pourtant elle n'est pas tout près, il aura fallu qu'il se plante sacrément ! Décidément ce n'est plus ce que c'était l'armée, depuis que les communistes ont capitulé,