page 414 le patriarche 415

Elle se met à pleurer, elle me regarde avec ses grands yeux.

- Et bien oui c'est vrai, ça fait quelques jours déjà, en fait c'était le premier soir où nous sommes arrivés, le soir où tu t'es fait attaquer. Je pense que c'est pour me dire ça qu'il n'est pas parti avec toi, il s'en veut tu sais. Et chaque fois que je te vois souffrir à cause de tes blessures je m'en veux aussi, qu'il soit rester pour moi alors que tu aurais pu y laisser la vie...

- Oublions, qui aurait pu prévoir ? Nous n'avions eu un problème avec des animaux sauvages que le premier jour, et plus aucun depuis, nous avions baissé nos gardes, c'est normal, je ne suis pas sûr que je serais allé avec lui s'il était parti tout seul... Enfin si peut-être, enfin j'en sais rien, peu importe ; on ne pouvait pas savoir que ce serait plus dangereux par ici... Et toi qu'est ce que tu en penses ?

- De quoi ? D'Erik ?

- Et bien oui, Erik, il te plaît, je ne sais pas ? Tu as des sentiments pour lui ? Tu penses que tu pourrais en avoir ?

- Je ne sais pas trop, mais je crois que je m'attache un peu à lui, surtout depuis ses déclarations, j'y pense beaucoup... Mais je ne voudrais pas le faire sans ton accord.

- Mon accord ? Mais tu fais ce que tu veux, je suis pas ta maman !

- Non, c'est pas ce que je veux dire, mais... Et tu n'as pas répondu, pourquoi tu m'as dit que nous ne ferons plus l'amour, pourquoi tu étais si sûr de toi, tu n'as jamais changé d'avis sur ce genre de sujet ?

C'est clair, ça va mal finir...

- Je ne le veux pas.

- Mais pourquoi tu ne le veux pas, je ne te plais pas ? Pourtant, l'autre fois dans la mer tu n'as pas semblé dire ça.

- Disons que je ne me l'autorise pas.

- Pourquoi ?

C'est la galère ce genre de questions, le pire c'est que je sais que quelque soit la façon dont je vais tenter de m'en sortir, je vais la blesser...

- C'est difficile à dire, parce que je ne veux pas juste profiter de toi comme ça, juste, sans vraiment te connaître, sans...

Elle me coupe, s'énerve un peu :

- C'était peut-être vrai à Melbourne, la première fois, mais on commence à se connaître maintenant ! Et puis ce n'est pas profiter si je suis d'accord, c'est tous les deux, ce n'est pas égoïste, je ne comprend pas. En plus ce que tu dis n'est pas vrai, quand tu as couché avec Deborah, tu la connaissais depuis trois jours, tu ne peux pas dire que tu la connaissais plus que moi !

- C'est vrai, mais je veux pas te blesser, je veux pas...

Elle me coupe et elle est tout à fait énervée maintenant :

- Tu penses que je ne suis pas assez forte pour toi c'est ça ? Tu penses que je ne te mérite pas, qu'il te faut plus... Non, pas moi, quand même ! Moi la petite boulangère étudiante en histoire ! Deborah, elle, elle gérait toute l'exploitation, elle avait tous les beaux mecs du canton à ses pieds, ça c'est une fille pour toi ! Mais pas moi...

Elle pleure à chaudes larmes. Je m'approche pour la prendre dans mes bras.

- Ne me touche pas ! Réponds ! Allez réponds ! Ose dire que je n'ai pas raison !

- Tu n'as pas complètement tord, peut-être, c'est vrai, mon orgueil fait sans doute parti des raisons, mais c'est surtout parce que je pense que je te blesserais, parce que oui, je pense que tu n'es pas assez forte pour moi, que tu t'attacherais trop et que moi j'ai besoin de quelqu'un de fort, j'ai besoin pour aimer d'avoir une pente à gravir, si tant est que je puisse encore aimer vraiment...