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ou qu'elles ne marchent pas comme prévu.

La marche à suivre convenue, nous redescendons vers notre radeau et attachons une première combinaison à l'arrière. Toutefois nous n'avons pour l'instant pas d'eau, et il serait bien malheureux qu'il ne repleuve pas de nouveau avant que nous partions, et que de nouveau plusieurs jours de sécheresse s'enchaînent. Mais de gros nuages continuent à arriver, et s'il ne pleut pas ce soir, d'ici à demain matin nous devrions avoir de quoi faire... Nous profitons de la soirée pour mettre en place, grâce à des feuilles de palmier, de quoi faire de l'ombre sur le radeau, trois petits carrés de feuilles maintenus par une armature en bois.

La chance nous sourit, et une pluie fine et continue commence vers le milieu de la nuit. Il fait très sombre, aucune lumière, cette planète ne semblant pas posséder de lune, ou tout du moins nous ne l'avons pas vu pendant les trois semaines depuis lesquelles nous sommes arrivés. Nous avons placé les récipients sur le radeau, et une fois ceux-ci plein, nous les vidons dans la combinaison. Le tout n'est pas très rapide, d'autant que la pluie n'est pas aussi chaude que celle de la cuvette, et nous sommes vite transis par le froid. Heureusement l'eau de la mer, elle, est encore toute tiède et nous réchauffe à tour de rôle. Nos deux récipients doivent représenter à peu près cinq litres chacun, mais leur ouverture est trop étroite et leur remplissage est très lent. Nous tentons d'utiliser le fond des cages métalliques pour canaliser l'eau, mais cette technique reste encore trop lente pour espérer remplir la combinaison. Les petits filets d'eau qui se forment sur la pente du cratère auraient plus de débit, mais ils ont tellement l'air chargé de limon que nous hésitons à nous en servir.

Bref, le petit jour se lève et nous n'avons pour l'instant versé que quatre récipients dans la combinaison, soit une vingtaine de litres. Finalement en désespoir de cause nous utilisons les écoulements venant de la paroi. Le débit y est important et en quelques minutes le récipient est rempli. Nous laissons ensuite l'eau se stabiliser à l'abri sous les arbres et les particules en suspension se déposer au fond pendant une dizaine de minutes. Naoma tente elle d'utiliser quelques feuilles de palmiers d'où s'échappe un mince filet d'eau pour remplir un autre récipient. Le temps que les limons se déposent, sa méthode n'est pas beaucoup plus longue que la notre pour

obtenir un récipient plein. Mais en confectionnant nous même avec les feuilles un tuyau d'écoulement, l'idée de Naoma devient même brillante.

Quand la pluie cesse, en fin de matinée, et qu'exténués nous allons nous coucher, nous avons les deux combinaisons remplies ; toutefois leur tissus étant extensibles, et l'eau sans doute pas assez dense pour créer une pression suffisante partout, les jambes sont correctement remplie mais le torse n'est pas aussi plein qu'il le pourrait. Mais nous avons tout de même compter sept ou huit récipients plein par combinaison, ce qui doit nous faire une quarantaine de litres, soit quatre-vingts au total. En répartissant sur les douze jours de voyage, notre ration ne correspond plus qu'à un peu plus de deux litres par personne et par jour, ce qui devient beaucoup plus limite, mais nous n'avons guère le choix.

Nous nous réveillons pour un superbe coucher de soleil, en début de soirée, en ce trentième jour, premier mois que nous fêtons par un feu et un festin de poisson grillé. Nous ne sommes plus du tout fatigués d'avoir dormi toute la journée et plutôt impatient de reprendre la route, enfin. Le radeau chargé, nous décidons de partir le soir même, le temps s'éclaircissant et la fraîcheur de la nuit rendant le maniement des rames plus supportable. Naoma s'absente un dernier instant alors que nous vérifions avec Erik que les combinaisons ne fuient pas.

- Regardez ce que j'ai trouvé en allant faire pipi un peu plus loin.

Naoma revient avec des sortes de roseaux, Erik se moque :

- Tu veux faire un bouquet de fleur pour fêter notre départ ?

- Mais non, regarde, les tiges sont longues et creuse, elles pourront servir de pailles pour boire dans les combinaisons, sinon nous en aurions sans doute renversé à chaque fois !

- Pas bête !

Erik la taquine :

- Ça m'étonne de toi...