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tout fout le camp. J'espère qu'on va pas tarder à aller en Irak, histoire que les jeunes reprennent un peu du service ; ils passent le plus clair de leur temps à faire des jeux vidéo, pas étonnant qu'ils fassent n'importe quoi ! Vous allez leur faire un procès, j'espère ? Il faut leur foutre la pression, et il faut que cette histoire se sache, que ça leur bouge les fesses. Et comment s'appelle votre cousine à Austin ? Je connais deux-trois personnes par là-bas.

- Euh, Guisseran.

Je donne le nom de mon grand-père, qui est bien né aux États-Unis avant de revenir en France, alors que la plupart de ses frères sont restés ici.

- Ah, hum non ça ne me dit rien, enfin, Austin est une grande ville...

- Bon papa, je lui donne la chambre d'ami ? Ou tu préfères que je le mette dans l'écurie, comme Peter l'autre jour ?

- Non, donne lui la chambre, et ne remets pas cette histoire de Peter sur la table, tu sais très bien pourquoi ce pouilleux ne dormira jamais dans ma maison !

- Pfff. Bon, viens avec moi Ylraw.

Je monte à l'étage en suivant Deborah qui me montre ma chambre.

- Tu sais, je crois que tu as vraiment impressionné mon père avec la citerne, et moi aussi d'ailleurs, j'avais raison de me méfier avec tes airs tout rabougris. Jusqu'à présent personne ne lui avait tenu tête, et là tu l'as carrément humilié. Heureusement que son pote Ted n'était pas là, sinon mon père n'aurait jamais plus osé aller faire de poker avec ses potes, tellement il aurait eu honte. Il fait toujours ça, dès qu'un nouveau se pointe, il s'imagine toujours que c'est un bandit qui veut lui piquer son ranch ou sa fille, et il invente toujours une histoire pour le mettre à l'épreuve, comme remplir cette citerne.

- La pompe n'est pas cassée ?

- Pfff ! Ça fait bientôt dix ans qu'elle est cassée, cette pompe ! Et d'habitude on utilise la voiture pour transporter les

bassines. Bon, tu as une salle de bain à côté, je vais te mettre des linges. N'hésite pas si tu as un problème, ma chambre est au bout du couloir en face. Mon père est juste à côté pour vérifier que personne ne me rend visite la nuit tombée. S'il savait, le pauvre.

Ces histoires familiales m'intéressent beaucoup, mais je n'en peux plus ; je remercie Deborah pour tout, et je n'ai même pas le courage de prendre une douche ni même le temps de me déshabiller avant de m'effondrer et de m'endormir sur le lit. Je me relève une fois dans la nuit pour aller boire, et en profite pour regarder un peu les étoiles au dehors, les volets n'étant pas fermés. Je prends la pierre de ma poche et la serre dans ma main. Il semble que les effets du bracelet se soient presque totalement estompés. J'observe les étoiles en la tenant dans ma main. Ah mes étoiles ! Où donc me menez-vous !

Je me passe le visage par l'eau mais je ne me glisse pas dans les draps pour ne pas les salir, je n'ai pas la volonté de prendre une douche. Je dors plus que de raison et c'est Deborah qui me réveille en frappant à la porte vers 10 heures du matin, en ce mardi 12 novembre. Elle n'ose pas dans un premier temps ouvrir la porte, c'est moi qui me lève et lui dit qu'elle peut entrer. Elle fait la moue en voyant que je n'ai même pas pris de douche :

- Excuse-moi de te réveiller, mais tu as dormi près de douze heures, je m'inquiétais. Tu as de la chance ce matin papa est parti tôt, un de ses potes a récupéré ses pouliches à une trentaine de miles d'ici. Je dis que tu as de la chance parce que sinon ça ferait un bout de temps que tu serais au travail avec lui.

- C'est pas grave que tu me réveilles, de toute façon il ne faut pas que je traîne trop dans le coin, je vous mets en danger en restant là.

Elle ne sait pas quoi dire un instant, puis bafouille :

- Euh, mais non, comment pourraient-ils savoir que tu es ici ? Reprends donc un peu des forces, et je te mènerai à la frontière dans une semaine. Je dois normalement aller à Austin pour la communion de la petite soeur d'une amie, je ferai croire à papa que je t'emmène à