Fin du quarante-sixième jour, nous sommes sur ce nouveau cratère, mais que va-t-on y découvrir ? Nous avons perdu tous nos outils, il ne nous reste guère que les quelques bouts de la combinaison de Naoma avec lesquels nous conservons un semblant de pudeur, et encore, Erik ayant perdu le sien, je dois couper la mienne en deux pour qu'il ne reste pas nu. Nous refusons tout deux poliment que Naoma lui prête le bout avec lequel elle masque sa poitrine, non pas que l'idée nous aurait déplu, toutefois...
Le soir tombant, nous n'avons guère plus de force qu'il n'en faut pour arracher quelques feuilles et nous confectionner une couche pour nous endormir quasiment instantanément, malgré notre sieste dans l'après-midi, l'épreuve nous a vraiment vidée de toutes nos forces. À l'ombre des sortes de palmiers, nous dormons sans doute plus de dix heures. Je me réveille à plusieurs reprises, inquiété par un bruit d'animal ou d'oiseau, mais je me rendors bien vite.
Le jour est déjà bien avancé quand nous nous levons enfin. Nous mourrons de faim, mais nous n'avons pas une envie foudroyante de poisson, et tombons d'accord pour nous contenter de quelques baies ce matin et de remettre à de l'autre côté de la montagne le festin royal, imaginant que ce cratère aura sans doute la même configuration que celui par lequel nous sommes arrivés sur cette planète étrange. Nous entamons l'ascension au plus vite, ne voulant pas avoir trop à supporter la chaleur qui s'annonce une fois de plus caniculaire. S'il n'est pas plus haut, le rebord de se cratère n'est sûrement pas plus bas que celui des bâtiments. Son ascension nous demande toute la journée, d'autant que pieds nus, elle est rendue très difficile. Nous n'allons certes pas vite et nous ne marchons pas durant plusieurs heures dans les fortes chaleurs de l'après midi, mais son sommet culmine sans doute bien au-delà des mille mètre au-dessus du niveau de la mer, peut-être mille cinq-cents. Nous n'y arriverons
que le soir.
C'est une fois de plus par un superbe coucher de Soleil que nous atteignons le sommet, et nous sommes loin d'être déçu du point de vue. Soleil, enfin, c'est un abus car ce n'est pas mon Soleil qui se couche dans des rougeurs magnifiques... Mon Soleil qui se trouve tellement loin, et que je ne sais même pas reconnaître parmi la multitude d'étoiles peuplant le ciel nocturne... Mais pourrais-je même le voir ? Ne suis-je pas si loin que je ne puisse même distinguer sa lumière ? Ah, Terre...
Nous sommes aussi étonnés du cratère, il a une forme différente des précédents, quand bien même qu'il en soit effectivement un. Il possède une forme allongée, sans doute le météore l'ayant formé percuta le sol avec un angle faible, créant une longue bande de terre émergeante dont nous sommes à l'extrémité. Il est échancré et la mer pénètre à l'intérieur par la partie Nord, qui s'ouvre dans une baie bordée à l'Est par une large langue de terre qui s'étend à perte de vue au delà de l'horizon. La pente à l'intérieur est assez abrupte et ne laisse qu'une bande forestière de quelques kilomètres à peine de largeur autour du lagon. Le lagon lui-même doit faire plusieurs dizaine de kilomètre de large, cinquante, soixante, peut-être quatre-vingt. Aucune ville ou village ne nous apparaissent, mais nous ne distinguons pas clairement les détails de l'étendu au Nord qui s'efface dans la nuit à l'horizon.
Nous mourrons de faim, et si beau soit la vue il nous tarde de trouver de quoi nous sustenter. Mais aussi pressés soyons-nous, la descente est longue et pénible, et la fatigue, la soif et l'épuisement nous gagnent. Mais il nous sera difficile de passer une nuit supplémentaire sans boire et manger, et nous ne pouvons nous permettre d'abandonner, après tout ce que nous avons parcouru... Il fait nuit noire quand, enfin, nous atteignons la forêt. Nous nous ménageons un petit lit en contre-haut, Erik reste avec Naoma et je pars à la recherche de nourriture. Il fait très sombre et j'ai peine à distinguer ; de plus j'ai quelques craintes à trop m'introduire dans la forêt, et je reste à la lisière.
Il me faut une bonne demi-heure avant de trouver enfin une sorte de fruit qui semble ressembler à ce que nous avions l'habitude de manger au début. Mais je n'ai rien pour les transporter et ce serait