éveillé mais tout défile sans que je saisisse vraiment les images ; impossible de reconnaître ou distinguer quoi que ce soit. Je demande finalement à un passager s'il peut m'indiquer la direction du bus. Je ne comprends pas tout mais après quelques précisions il semble que le bus s'éloigne du centre-ville. Je me renseigne par la même occasion sur l'adresse de l'ambassade française et l'heure qu'il est. Il est 11 heures 45 mais il ne sait pas où se trouve l'ambassade. J'envisage de descendre alors assez rapidement du bus, celui-ci s'éloignant du centre. Mais je n'en ai pas la force ; je suis exténué et je décide de rester à l'intérieur pour me reposer un peu, et surtout m'éloigner pour être un peu tranquille, prendre le temps de récupérer des habits et de quoi manger. Le centre de Sydney est sans doute surveillé par des caméras, et ils peuvent de cette façon me retrouver sans encombre dans l'hypothèse où ils sont effectivement infiltrés dans la police. D'un autre côté, me retrouver dans un quartier résidentiel ne m'avancera pas beaucoup. Mais la brûlure continue et mon pied me fait très mal, je n'ai pas le courage ni la volonté de bouger avant le terminus.
Terminus qui se trouve dans une partie de Sydney, à moins que ce ne soit une ville limitrophe, qui s'appelle Glebe, et qui se révèle être un choix judicieux. Je reprends mes esprits après m'être momentanément assoupi. En descendant du bus, mon pied étant froid, je me rends compte que je ne peux pas du tout marcher. Mais à peine m'appuie-je contre un poteau pour me reposer un peu et réfléchir où aller, que deux jeunes me demandent si je vais bien. Je suis toujours en courte chemise de nuit, et s'ajoute à mes bleus et blessures une cheville qui a doublé de volume, en plus du sang sur mon ventre. Je leur explique rapidement que j'ai peut-être la cheville brisée. Ils sont curieux de savoir ce qui m'arrive. Je détaille un peu plus en leur racontant mon kidnapping, mon évasion, l'explosion, l'hôpital, la fuite, la course-poursuite et la voiture qui me renverse... Je suis très étonné qu'ils ne me prennent pas tout de suite pour un fou. Je leur explique de plus mon intention de trouver l'ambassade pour tenter de retourner en France, car je suis français, précisé-je. Sur ce ils disent avoir rencontré à leur hôtel deux Français qui sauront éventuellement me renseigner. Ils me proposent de m'y accompagner, leur hôtel n'étant qu'à quelques centaines de mètres.
Une fois dans leur chambre, ils m'expliquent que Glebe est un peu
l'endroit où tous les voyageurs itinérants se retrouvent. Ils me proposent quelques trucs à grignoter que j'accepte plus que volontiers. Nous faisons les présentations, et ils me demandent ensuite un peu plus de détails sur l'histoire qui vient de m'arriver. J'ai affaire à deux anglais de Londres, Steve et Gordon. Ils m'expliquent qu'ils sont un couple homosexuel, et qu'ils font le tour du monde suite à la fin de leurs études, avant de se lancer dans la vie active. Ils arrivent de l'Île de Pâques et par la suite ils vont remonter vers l'Europe en passant par l'Asie du Sud-Est. Je trouve leur trajet très amusant car j'ai justement un ami qui fait, si je me rappelle bien, exactement la même trajectoire. Je leur dis son nom, mais ils ne semblent pas l'avoir croisé. Cela aurait été une sacrée coïncidence pourtant !
Bref, après qu'ils m'aient expliqué leur trajet, l'un d'eux va voir s'il trouve les Français. Ils sont bien là, juste revenus des courses pour le repas du midi. Nicolas et Fabienne, qui eux aussi sont des randonneurs mais qui se contentent de l'Australie et l'Océanie. Ils sont un peu plus âgés, la trentaine passée. Ils viennent de Paris. Chaque année pendant les cinq semaines de vacances qu'ils peuvent prendre, ils font une région du monde à pied. Cela me fait du bien de retrouver quelques compatriotes. Les deux anglais m'ont prêté un tube de crème pour les entorses, et je leur raconte à mon tour mon histoire, pendant que je me pommade la cheville. Je n'omets rien de la découverte du bracelet jusqu'à maintenant. Ils sont éberlués. Un moment où Steve va aux toilettes, et où je fais une pause, ils me demandent s'ils peuvent toucher et regarder la pierre, que j'ai toujours dans la main. Bien sûr ils ne ressentent rien de particulier. Et je leur explique que je suis conscient qu'elle n'a sûrement aucun effet. Mais j'ai tellement l'impression qu'elle me donne de la force et du courage que je ne m'en séparerais pour rien au monde. Steve revient et je continue de raconter.
- Je sais que mon histoire est démente, et moi-même j'ai peine à y croire. Mais mes multiples blessures et notamment la balle que j'ai reçue dans l'épaule sont là pour en témoigner.
Je ne sais pas s'ils me croient ou pas. Toujours est-il qu'ils sont très gentils et me donnent chacun quelques habits dont ils veulent se débarrasser, ou en mauvais état. Je me retrouve habillé de